Cluster 13

Projet Patrimoine et territoire

Voyage, territoire, savoirs. L’espace culturel des villes italiennes à l’époque moderne, de l’imaginaire au réel

2009
contact : Gilles Bertrand

1- contexte scientifique et objectifs du projet 2- description du projet, méthodologie 3- résultats attendus

Contexte et objectifs scientifiques

En se chargeant d’explorer le rapport entre voyage, territoire et savoirs, le projet prend en compte la spatialisation de phénomènes couramment associés à l’histoire culturelle. Cette dernière est ici comprise comme une histoire de la construction des savoirs (intellectuels, scientifiques, artistiques, religieux, etc), de leur circulation et de leurs échanges. Il est d’emblée considéré que toute relation créatrice de lien social, donc constitutive d’une vie culturelle et pouvant déboucher sur une mise en écriture de l’expérience, s’inscrit dans des lieux matériels, qui sont ceux des villes ou des paysages séparant les villes entre elles. Cette histoire implique aussi des individus qui se déplacent, se rencontrent, correspondent, influent sur les choix de certaines autorités et rapportent de leurs voyages des modes d’appréhension du monde, des savoir-faire, des modèles artistiques et formels, des objets et des connaissances ayant un impact non seulement sur les espaces visités mais également sur les espaces d’où ils proviennent et où ils font retour. On vise par là le déplacement en tant que machine à produire des représentations sur les territoires, non moins que les limites du rôle des voyages dans la définition d’espaces concrets fonctionnant par bien des aspects indépendamment du regard des étrangers. Ces lieux sont sans cesse remodelés et soumis à une dynamique au sein de laquelle interviennent toutes sortes d’acteurs

L’espace à explorer concerne l’Italie et le Sud-Est de la France, de Lyon à Rome et Naples en passant par Grenoble. Il s’articule sur une vision des espaces urbains en tant que théâtre d’interactions et de transferts culturels, renvoyant à des dynamiques intellectuelles européennes. À cette fin, le projet s’organise en deux volets complémentaires.

Description, méthodologie et résultats attendus

Un premier volet consiste à réaliser une série de cartes en vue de l’élaboration d’un atlas culturel des villes italiennes aux XVIIe et XVIIIe siècles. Celui-ci ne peut bien sûr s’imaginer qu’en exploitant les recherches menées récemment ou en cours sur les milieux savants, intellectuels et artistiques de quelques villes capitales : Rome, Milan, Naples, Venise, Turin, Florence. À celles-ci s’ajouteraient dans l’espace alpin Lyon et Genève, ainsi que les espaces montagnards des Alpes occidentales saisis à travers leur constitution cartographique progressive.

Le but est d’effectuer ce que les travaux italiens sur l’histoire culturelle n’ont guère jusqu’à ce jour réalisé, à savoir des cartes permettant de visualiser dans les villes choisies la répartition spatiale des lieux culturels et les évolutions de cette dernière. On se propose d’une part de tirer parti des expériences de construction cartographique menées sur Rome, Milan et Venise (notamment à l’aide du SIG), d’autre part d’ajuster l’instrument cartographique à des objets tels que la répartition des infrastructures savantes et des lieux de sociabilité autour desquels s’organise la rencontre entre Italiens et étrangers, de même qu’entre individus aux préoccupations variées.

Cette entreprise s’inscrit dans la mouvance de celles qui ont été récemment menées dans le cadre de l’Atlas de l’histoire de France chez l’éditeur Autrement (cf. J. Boutier et G. Balavoine pour la France moderne) et du programme ANR Jeunes chercheurs « Savoirs et capitales européennes (XVIIe-XXe siècle) » piloté par S. Van Damme (2006-2009), ainsi que de celles qui sont en cours ou projetées par exemple sur la fraternité politique en Europe au XIXe siècle (programme blanc ANR 2009-2012 coordonné par C. Brice) ou sur la cartographie du triennio patriotique (1796-1799) en Italie sous l’impulsion de l’École française de Rome.

L’autre volet du projet tient compte de la nécessité de connaître de façon plus systématique d’une part les acteurs de ces processus de construction des savoirs que l’on aura cartographiés, en se concentrant sur les voyageurs et résidents étrangers, d’autre part leurs productions écrites et iconographiques, afin d’en tirer toutes les connaissances utiles pour mieux comprendre leur appréhension des territoires dont ils sont amenés à parler.

Ce travail se situera sur plusieurs registres

- les biographies individuelles, intégrant dans la perspective d’un dictionnaire des voyageurs français en Italie encore à réaliser des données biographiques et des éléments de leurs parcours ou rencontres, éventuellement cartographiables.

- la numérisation de quelques manuscrits de voyageurs ou résidents demeurés inédits ou difficilement accessibles, en coordination avec le site de la BNF sur les récits de voyage, le CRLV (Centre de Recherche sur la Littérature de Voyage de l’Université de Paris IV) et la base de données constituée autour du projet ANR (et ex-GDR n° 2649) des écrits sur le for intérieur.

- la collecte et la réflexion critique sur des images présentes dans les livres de voyages, atlas ou descriptions de villes, en vue de faciliter leur mise en rapport avec les descriptions écrites et leurs usages via internet par des institutions ou des amateurs d’aujourd’hui (cf. le projet Viaticalpes piloté par l’Université de Lausanne avec pour cible les images des Alpes, à étendre aux images de l’Italie en coordination avec le Cabinet Vieusseux de Florence).

Il s’agit par de premières réalisations de forger les outils qui permettront une mise en relation systématique des lieux désignés dans les plans de villes avec leurs représentations iconographiques telles qu’elles étaient véhiculées à l’époque moderne. Ce travail vise aussi à rendre accessible et à interpréter le vaste corpus d’images viatiques de l’époque moderne et du XIXe siècle sur l’Italie et la France du Sud-Est présent dans l’espace rhônalpin autant qu’en Italie. Les bibliothèques municipales de Lyon, Grenoble et Chambéry sont déjà sensibilisées par l’intermédiaire du projet Viaticalpes à la dimension iconographique de ce projet de base de données.



Établissements rhônalpins engagés :
— Université Lumière Lyon 2 (établissement porteur), ENS-LSH (établissement d’hébergement)
— INSA, Université Claude Bernard Lyon 1, Université Jean Moulin Lyon 3, Université de Savoie (Chambéry), Université Stendhal Grenoble 3, Université Pierre-Mendès France Grenoble 2, Université Jean Monnet Saint-Étienne

Le CNRS participe à travers ses chercheurs à temps plein et son rôle d’opérateur national auprès des unités de recherche ou de service dont il partage la tutelle avec les établissements précités, y compris l’Institut des Sciences de l’Homme.

Dans la seule limite de ses moyens, le cluster a naturellement vocation à faire bon accueil à toute proposition en rapport avec ses thématiques lorsqu’elle émane de collectivités territoriales, d’associations, d’institutions ou d’entreprises rhônalpines.