Jean-Toussaint Desanti

Le philosophe Jean-Toussaint Desanti (1914-2002) a enseigné à l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm, où il a notamment formé Louis Althusser et Michel Foucault, à l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud, puis à la Sorbonne où il a préparé à l’agrégation de philosophie des générations d’étudiants. Par son enseignement comme par les travaux auxquels il a donné leur impulsion, Desanti est l’une des personnalités les plus marquantes de l’université française.

Phénoménologie, mathématiques, pensée grecque : Desanti visait la constitution d’une histoire de l’engendrement spécifique des systèmes de pensée. En 1968 paraît son maître livre, Les Idéalités mathématiques, recherches épistémologiques sur le développement de la théorie des fonctions de variables réelles, par lequel Desanti rompt « avec la tradition d’une philosophie censée dire la vérité des sciences en les regardant de haut », et où il montre « comment le philosophe doit aller "sur le tas" afin de saisir comment fonctionne telle ou telle fabrique d’énoncés scientifiques. » Pour cet ouvrage, fruit d’un travail de plus de vingt ans, Desanti s’est véritablement fait mathématicien, afin d’être capable« d’interroger les mathématiques de l’intérieur ».

La complexité et la technicité de ce type d’ouvrage, qui font appel à une double compétence mathématique et philosophique, en réservent l’accès aux spécialistes aguerris. A contrario, tous ceux qui l’ont connu soulignent la simplicité et la simplicité de Desanti : dès qu’il se mettait à parler, dans ses cours,conférences, entretiens publics ou privés, il « se transformait (...) en conteur. Il inventait des fables, multipliait métaphores et comparaisons, » était capable de présenter de manière imagée et claire une question de phénoménologie particulièrement complexe ou un point obscur dans le système conceptuel d’un penseur grec.

« C’est pourquoi il excellait dans les livres de dialogues : Le Philosophe et les pouvoirs, avec Blandine Barret-Kriegel et Pascal Laîné en 1976, et surtout, en 1992 et 1999, Réflexions sur le temps et Philosophie, un rêve de flambeur, deux séries de conversations avec Dominique-Antoine Grisoni. » (Roger-Pol Droit, « Jean-Toussaint Desanti », Le Monde, 21/01/2002)

C’est pourquoi aussi les spécialistes de Desanti sont arrivés à la conclusion qu’une part substantielle de son oeuvre - et un point d’accès essentiel à sa pensée - sont contenus dans les milliers de pages manuscrites (notes préparatoires à des cours et conférences, projets d’entretiens, etc.) accumulées au long de sa vie.

L’archive numérique Desanti

Responsable : David Wittmann

Les archives de Jean-Toussaint Desanti, composées de 16 000 documents environ (cahiers, feuillets, articles, mémoires et thèses, coupures de presse, etc.) représentent un ensemble évalué à plus de 60 000 pages. Une convention entre l’ENS LSH et l’IMEC (Institut Mémoires de l’édition contemporaine) a permis d’élaborer une stratégie de préservation et de valorisation de cet ensemble documentaire.

En savoir plus sur le programme de numérisation

Enfin, dans le cadre du Cluster 13, cette archive numérique donne lieu depuis novembre 2007 à un travail de thèse en informatique théorique sur l’annotation collaborative de corpus et les documents multistructurés, travail mené par Pierre-Edouard Portier (laboratoire LIRIS) : http://cluster13.ens-lsh.fr/spip.php?article102